Conférence de Michèle Forestier, kinésithérapeute :
La rééducation d’un torticolis à travers la motricité libre.
Le lien entre plagiocéphalie et retard moteur est avéré. Les plagiocéphalies et les torticolis présentent souvent un retard de diagnostic qui limite la prise en charge.
L’objectif du traitement en kinésithérapie sera de limiter les conséquences de ces plagios ou torticolis, et donc de prévenir les troubles qui y sont associés, tels que l’asymétrie des membres supérieurs ou la négligence d’un hémi-corps, l’incurvation de la colonne vertébrale pouvant aller jusqu’à la scoliose, les blocages de hanches, les retards moteurs, les problèmes ophtalmologiques…
Le traitement par la motricité libre est basé sur le travail d’Emmi Pikler, qui a montré une régression des plagiocéphalies quand elle est pratiquée avant 4 mois. Elle met en avant l’importance du déplacement au sol durant les phases d’éveil avant la mise en place de la marche, laissant l’enfant se mouvoir en liberté. La prise en charge va jusqu’à la symétrie de la marche.
Le concept est de retarder la verticalité pour solliciter activement les muscles qui modèlent la tête et ceux de la ceinture scapulaire qui contrôlent le cou. Cela peut se faire précocement. Il s’agit au contraire de respecter la construction motrice, au rythme du bébé, tout en faisant de l’accompagnement parental, et ce par des jeux moteurs l’incitant à contrôler et stimuler ses muscles agonistes et antagonistes. A noter que selon ce concept, la verticalité précoce est considérée comme particulièrement néfaste, bien que promue par l’image sociale et les diverses publicités.En effet, la position assise n’apparaît pas naturellement dans la mise en place de la marche, elle y fait même obstacle dans certains cas.
Dans un premier temps, l’enfant posé en décubitus sera amené à rassembler ses 2 mains, ce qui favorise la bidextrie et sa coordination, puis à s’enrouler pour attraper ses 2 pieds avec ses 2 mains, ce qui étire les chaînes musculaires. Lorsque l’enfant est tout petit, on fait à sa place, le travail est passif, adapté, répété. Il ne faut pas renoncer, même s’il n’aime pas, dès qu’il a des phases d’éveils, dès la naissance, plusieurs fois par jour.
Le latérocubitus est toujours difficile chez les enfants plagiocéphaliques ou à torticolis congénital.
C’est le procubitus qui sera le plus fondamental, car il muscle la chaîne prostérieure, incite à la traction musculaire sur le crâne. On veillera à ce que les mouvements soient toujours symétriques, et on incitera en ce sens.
Du procubitus naitra le retournement, qui doit pouvoir se faire des 2 côtés et dans les 2 sens, pour mettre en torsion symétrique toute la colonne.
Le retournement initie le pivot, le choix de l’enfant de s’orienter, de se diriger.
Puis il se mettra à 4 pattes, ce qui modèlera sa coordination motrice et la symétrie de sa colonne vertébrale.
Par la suite, il conviendra de laisser l’enfant escalader.
Il faut davantage se soucier de l’ordre de ces étapes que de l’âge auquel elles sont exécutées.
Quand l’enfant maîtrise toutes ces phases, il peut commencer à être posé assis, car maintenant seulement sa colonne n’en souffrira pas. Plus tôt, toutes les positions assises verrouillent les hanches et le bassin, interdisent le déplacement de l’enfant qui ne sait pas se soutenir sur ses bras, (ce qui amènera le déplacement sur les fesses) et peut exagérer la malposition de la tête par une musculature insuffisante. Limiter la verticalité, c’est limiter la pesanteur. On conseillera donc aux parents d’éviter toutes les positions assises, ou semi-assises (transat, ou pire, youpala ou trotteurs), de ne pas le mettre debout sous prétexte qu’il pousse sur ses jambes, ne pas l’encourager à marcher tant qu’il n’est pas prêt, ne pas le faire marcher avec les mains tenues hautes, car cela bloque la cage thoracique et les membres supérieurs.
On conseillera au quotidien de varier le portage, de retourner l’enfant avec les mains en opposition dos-ventre, de veiller à ne pas laisser un bras partir en arrière lors des tétées, de jouer à l’enroulement au moment du change, d’en profiter pour le mettre sur le côté et sur le ventre à chaque change, autoriser les bains libres (sous surveillance bien sûr), donner la priorité aux positions à plat qui laissent un maximum de liberté (parc ou autre).
michele-forestier.fr : de la naissance aux premiers pas
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